La reprise, c’est ce moment clé qui cloture la fin du congé maternité et signe le retour au travail. C’est le moment où, après avoir endossé une identité totalement nouvelle, et qui remet à peu près tout en question dans sa vie personnelle (l’identité de parent, et plus précisément de mère), on doit retrouver son identité professionnelle, accepter que son enfant ait une vie à lui, et découvrir un rythme neuf : celui d’une organisation quotidienne où toutes ces données peuvent coexister et s’épanouir.
La clé de la reprise, c'est que ça se prépare, et nous étions très heureux d’en parler avec Kendaore Sonzogni, coach partenaire Chance et mère de 2 jeunes enfants, et Mélodie Exbrayat, sage-femme, intervenante sur l’application May et mère d’un bébé de quelques mois (en pleine reprise elle aussi !), lors d’un live organisé par Chance et May, l'application qui accompagne les parents de la grossesse à l'entrée à l'école.
Retrouvez ici la vidéo du live :D’abord, déminons les généralités : la reprise n’est pas forcément difficile pour tout le monde et certaines personnes ont très hâte de revenir au travail. Pour autant, c’est davantage la séparation avec son enfant qui peut l’être. Et surtout, ce qui est sûr, c’est que la parentalité change tout, qu’on n’est pas la même personne avant et après. C’est ça qui est à prendre en compte dans la reprise. Et ça, ça s’accompagne.
“Aujourd’hui, on devrait être mère comme si on n’avait pas de travail et être au travail comme si on n’avait pas d’enfant”, Illana Weizman
La question de la légitimité est très importante, et la société n’est clairement pas cablée pour nous aider : comme l’énonçait Illana Weizman (autrice de Ceci est notre post-partum), “Aujourd’hui, on devrait être mère comme si on n’avait pas de travail et être au travail comme si on n’avait pas d’enfant” - or c’est tout bonnement impossible et se prêter à cet exercice peut faire foncer droit vers le mur du surmenage.
Il est ainsi nécessaire de revenir au factuel sans se référer à des projections, injonctions ou à des croyances selon lesquelles être parent au travail ferait perdre de nombreux points de légitimité professionnelle (et inversement, que travailler et y prendre plaisir ferait de nous de mauvaises mères).
Regarder ses accomplissements (le fameux verre à moitié plein, incluant le fait d’avoir tout simplement vécu et surmonté l’épreuve gigantesque de la grossesse et de l’accouchement, mais aussi le talent que vous mettez dans vos initiatives personnelles et professionnelles), et cesser de s’excuser serait alors la clé, affirment à l’unisson la sage-femme Mélodie Exbrayat et la coach professionnelle Kendaore Sonzogni.
Car vu les injonctions sociales à être pleinement mère (et donc entièrement dédiée à sa progéniture), et à être AUSSI au plus haut niveau de performance professionnelle, TOUT EN ÉTANT naturellement canon, jeune et sexy, les femmes s’excusent d’un bout à l’autre de leur maternité, dès le test de grossesse, d’être enceinte, de vouloir travailler, d’avoir des contraintes nouvelles (notez que peu de pères s’en excusent - hum, mais comment diable ? Peut-être que parce qu’ils ne sont pas attendus sur ça, oui, ça y est on se souvient).
Or tout cela est absolument légitime, rappellent Mélodie et Kendaore. Vous êtes légitime dans vos demandes, vos besoins, votre ambivalence, vos contradictions. Tout ça vous rend humaine, personne n’y coupe (juste personne n’en parle, ou en tout cas pas assez, donc on a tendance à se dire qu’on est la seule à vivre les choses de manière complexe, ce qui a pour conséquence qu'on n'ose pas en parler).
Vous êtes légitime dans vos demandes, vos besoins, votre ambivalence, vos contradictions.
1- Vous êtes formidable. Mettez-vous ça en tête
D’abord, mettez-vous en tête que la mère “parfaite” telle que la société et Instagram vous la présentent n’existe pas. La meilleure mère, rappelait Mélodie, c’est celle qui sait s’écouter, qui assume ce qu’elle est dans ses limites, et qui transmet ce qui la fait vibrer (et si ce qui la fait vibrer est de bosser d’arrache-pied, son enfant se sentira équilibré de sentir sa mère équilibrée).
2- Anticipez la reprise
Le moment précis de la reprise induit un changement d’organisation drastique, il s’agit donc d’anticiper cette organisation au niveau du couple (qui va chercher l’enfant à la crèche quel jour, les tâches ménagères sont à partager équitablement au plus tôt), et vous faire aider par des personnes extérieures est indispensable.
Et comment gère-t-on l’angoisse de séparation de son enfant ?
L’angoisse de séparation, chez le bébé, a lieu vers 9 mois : si vous faites garder votre enfant à ce moment-là, essayez de passer du temps régulièrement avec les personnes qui vont le garder, indique la sage-femme Mélodie. Cela créera un terrain connu. Parlez à votre enfant (car les bébés comprennent tout) et expliquez-lui qu’il va être gardé par quelqu’un avec qui il sera en totale sécurité.
3- Levez le pied
Il s’agit aussi de lever le pied : on se met énormément de pression alors que les petits pots tout prêts sont formidables, que le ménage à fond n’est pas essentiel. Ce qui est essentiel, c’est que votre charge mentale, désormais bien alourdie, ne prenne pas le pas sur votre équilibre psychique.
4- Votre corps doit être choyé
Et évidemment, rappelle la sage-femme Mélodie Exbrayat : prendre soin de son corps, qui a pris cher avec la grossesse et l’accouchement. Ne passez pas outre la rééducation périnéale, abdominale, etc. Ce ne sont pas des éléments d'agenda en plus ou en trop, ce sont des moments indispensables. Ce sont aussi des moments à vous, de reconnexion avec votre corps. Et le corps étant l’enveloppe de notre âme, il s’agit de le chérir.
1- Constituez votre équipe pour votre reprise
Dans le parcours Chance, on conseille de se créer une équipe qui va nous épauler durant la période qui nous fait transiter dans notre réflexion professionnelle. La reprise après le congé maternité est une période transitoire par excellence, et il est très utile de définir à l’avance l'équipe qui vous soutiendra :
Ça ressemble à de la charge mentale, mais non : une fois que tout ça sera posé, vous serez au contraire déchargée.
2- Reconnectez-vous à vos envies professionnelles
Il est important de ne pas oublier ses envies, ses attentes et besoins : de quoi ai-je besoin ? Un travail, ce n’est pas qu’un métier, c’est un tout formé par 4 piliers qu’il est bon d’analyser très régulièrement pour s’assurer qu’on soit en ligne avec sa vie professionnelle :
“Le congé maternité est une immense opportunité pour réfléchir à ce que l’on souhaite faire.”
3- Faites-vous accompagner
Il arrive qu’on n’ait pas du tout envie de retourner dans ce travail, qu'on n'y voie plus le moindre sens, et qu'on veuille tout changer dans sa vie professionnelle. Que faire ?
Déjà se faire accompagner est important : voir le sens se vider n’est pas anodin. Un psy, un coach, des techniques comme celle de l’EFT (technique consistant à se tapoter pour libérer les blocages émotionnels) peuvent pas mal aider, rappelle Kendaore.
La reprise et le congé mat : le bon moment pour interroger sa vie professionnelle ?
On a déjà tant à penser que certes, on pourrait se dire qu’on verra plus tard. Mais on a tout de même un peu de temps, à un moment clé de sa vie, où l’aspect existentiel est très fortement présent : c’est une immense opportunité pour réfléchir à ce que l’on souhaite faire, rappelle la coach Kendaore Sonzogni.
De très nombreuses femmes suivent Chance pendant leur congé maternité, justement pour faire le lien entre leur vie personnelle et leur retour à une vie professionnelle qui leur ressemblera.
4- Faites le point sur votre motivation et sur ce qui vous anime : une étape essentielle
Pour retrouver sa motivation, déjà, distinguez motivation extrinsèque (orientée résultats) et motivation intrinsèque (le plaisir).
Et que faire si on n’a aucune envie de retourner travailler ? Le congé parental
Le congé parental a 2 modalités :
Si malgré tout, ce congé est souhaité, sachez que l’employeur ne peut pas le refuser, et qu’il doit se dérouler avant les 3 ans de votre enfant. Un conseil tout de même, parlez-en avec votre employeur.
Votre organisation va changer, vous le savez. Et vous n’avez peut-être ni l’envie, ni les moyens pour demander à quelqu’un d’aller chercher votre enfant à votre place. Pour poser vos conditions, Kendaore suggère d’avoir recours à la communication non-violente dont les vertus sont concrètes pour obtenir ce dont on a besoin. Le modèle qu’elle préconise est l’OSBD.
L’OSBD est l’ordre dans lequel poser un sujet pour obtenir une issue positive. Bien appliqué, même si on peut vous dire non, les conséquences d’une demande ne seront jamais négatives car la demande aura été exposée de manière factuelle.
Exemple : de retour au travail, je sais qu’il faudra que je sois sortie du bureau au moins 2 jours par semaine à 18h pour aller chercher mon bébé. Comment l’exposer ?
L’allaitement et la reprise du travail : les conseils de Mélodie Exbrayat, sage-femme May
Oui, il est possible de poursuivre l’allaitement après la reprise. C’est en revanche une question d’organisation. Il vous faut un tire-lait (ça se loue, et ça se prescrit sur ordonnance - demandez à votre sage-femme), un frigo et des petits packs pour le conserver (pas des briques de 1 litre : après décongélation, ça se conserve peu de temps). Vous avez le droit à des pauses spécifiques en journée pour ça. Il existe des tas de ressources sur la logistique (temps de conservation, etc.) à ce sujet, notamment dans l’application May.
Une chose est sûre : le droit du travail est de votre côté, et vous pouvez vous ménager des temps pour tirer votre lait. Faites-le dans un endroit calme, isolé, digne (donc pas aux toilettes : une fois de plus, vous êtes légitime).
Vous êtes retournée au travail, votre vie a changé, mais tout a lieu comme s’il ne s’était pas passé grand-chose. Vous êtes accueillie comme si vous aviez eu une grippe de 2 semaines, alors que votre congé a été long, révolutionnaire sur le plan physique et psychique, que vos priorités ont changé. Pourtant vous aviez hâte de rentrer, mais ça coince. Vous vous reconnaissez ici ?
La reprise est assez mal comprise et pensée au niveau managérial, et est donc souvent mal anticipée. Faire des points réguliers, demander un gros onboarding sur ce qui s’est passé, les outils, l’équipe, les nouveaux objectifs, les nouvelles attentes, etc. peut énormément vous aider. Si la visite médicale de retour post-congé (elle est normalement obligatoire) n’a pas eu lieu, demandez-la, parlez au médecin du travail, posez vos questions. À un moment, ça va mieux, on retrouve son équilibre. On vous l’assure d’expérience.
Précision : les discriminations au retour de congé maternité
On ne va pas faire semblant, elles existent. 1 femme sur 4 les subissent. Si vous êtes concernée, faites-vous aider par un-e avocate. Nous vous conseillons cet épisode indispensable du podcast La Reprise avec Élise Fabing, avocate en droit du travail. Et globalement nous vous conseillons tous les épisodes de La Reprise, podcast passionnant et soutenant à cette période de la vie.
Comme le rappelle Kendaore, déchargez votre charge mentale : reconnectez-vous au plaisir chaque jour qui passe. Le plaisir c’est ce qu’il y a de plus personnel en soi. Or avec la maternité on a tendance à détourner son regard de ce qui nous fait du bien à nous, en dehors de notre bébé. Ce n’est pas facile de retrouver ses plaisirs quand sa vie a été très bouleversée. Faites-vous plaisir en pleine conscience au travail, avec une pause au soleil, un coup de fil un peu ritualisé à des ami-es après le travail, etc.
Pour continuer sur le sujet de la reprise
Retrouvez cet article très riche de conseils et de soutien : Comment concilier vie professionnelle, vie parentale et temps personnel ?